[Interview] Le SNA Perle a rejoint le site de Cherbourg

14 janvier 2021 Naval de défense Groupe Services aux flottes Sous-marins Story

Arrivé fin décembre à Cherbourg à bord d'un navire semi-submersible, le SNA Perle a intégré ce mercredi 6 janvier la forme Cachin, au cœur du site Naval Group de Cherbourg. Aidée par les remorqueurs de la Marine nationale, la Perle a été parfaitement échouée sur sa ligne de tins, dans le dispositif de mise à l'eau Cachin, zone dans laquelle seront menées les opérations de réparation. Depuis l'annonce le 22 octobre par la Ministre des Armées du choix de réparer le navire, les équipes de Cherbourg et de Toulon sont à pied d’œuvre pour le lancement de ces travaux hors normes. Franck Ferrer, directeur des programmes de la direction Services et responsable des opérations autour de la Perle, revient sur les enjeux industriels à venir.

Vous êtes responsable des opérations autour de la Perle. Comment décririez-vous la mission qui est confiée aux équipes Naval Group ?

Franck Ferrer : courant octobre, la Ministre des Armées a signifié son choix de réparer la Perle. Derrière cette décision, il y a bien sûr un enjeu stratégique pour maintenir les capacités opérationnelles de la flotte de SNA de la Marine nationale, mais il y a aussi le témoignage d'une marque de confiance envers l’industriel que nous sommes.
Nous mesurons bien évidemment l’étendue des responsabilités qui nous incombent et nous devons tout mettre en œuvre pour minimiser l’impact sur la disponibilité de la flotte et permettre à la Marine nationale d’exercer l’ensemble de ses missions et sa souveraineté.
Nous saurons être à la hauteur de la confiance que nous accordent nos autorités, clients et partenaires : si l’opération dans son ensemble est quelque peu hors normes, les équipes Naval Group maîtrisent les techniques et expertises, et ce à chaque étape des travaux de réparation.

Comment s’organisent les travaux de réparation ?

La solution de réparation choisie repose sur une « jonction » de l’avant du SNA Saphir - sous-marin retiré du service actif en juillet 2019 et qui depuis est basé à Cherbourg pour démantèlement - avec l’arrière du SNA Perle. Les opérations de réparation consistent donc en une succession de tâches de découpe, de soudures et de raccordement.
À vrai dire, les activités autour de ce chantier ont officiellement commencé dès novembre : aux côtés d’équipes cherbourgeoises, une centaine de collaborateurs toulonnais a rejoint le Cotentin pour préparer la découpe du Saphir. Les équipes vont maintenant procéder aux mêmes opérations de préparation sur la Perle. Par ailleurs, les équipes d'ingénierie sont elle aussi mobilisées depuis l'automne dernier, en soutien à toutes ces opérations.
Une fois les découpes de la Perle et du Saphir réalisées au cours du premier trimestre, nous procéderons ensuite à la jonction. Le chantier ne s'arrêtera pas à cette seule jonction, car il faudra ensuite reconstituer les ponts et cloisons internes, et bien sûr rabouter les nombreuses liaisons (environ 80 câbles, une vingtaine de tuyaux, etc.)
Au final, la Perle devrait revenir à Toulon en fin d'année 2021, pour poursuivre son arrêt technique, qui comprend notamment la mise à niveau du système de combat. La restitution du navire à la Marine nationale est prévue début 2023.

Combien de personnes participent à ce chantier ?

Près de 300 collaborateurs Naval Group et sous-traitants ! Ce chantier mobilise les expertises de différents sites de Naval Group, et démontre les savoir-faire exceptionnels de notre entreprise. Les travaux de découpe et de soudure de la coque épaisse seront menés par les experts du site de Cherbourg ; ils détiennent des compétences clés dans ce domaine. Les autres travaux de préparation à la découpe ou de raboutage des liaisons seront confiés aux experts du site de Toulon. Et n'oublions pas les contributions importantes des équipes d'ingénierie de Toulon, Brest et Cherbourg, qui mènent à bien les études de conception et de gestion des évolutions nécessaires à la réalisation des travaux de réparation.

S'agit-il d'une première ?

Mener un tel chantier dans ces circonstances - c'est-à-dire un chantier de réparation nécessitant d'associer l'avant et l'arrière de deux navires sistership - est bien sûr inédit dans l'histoire contemporaine de Naval Group. Mais si l'on observe les choses plus en détails, toutes les opérations que nous allons réaliser sur ce chantier sont connues et maîtrisées par nos équipes.
Naval Group a déjà par le passé réalisé des opérations très similaires dites de « jumboïsation » sur les sous-marins Agosta ou sur les sous-marins chiliens U209. Nous avons également par le passé su jonctionner des parties de sous-marins réalisés dans différents chantiers du monde, comme ce fut le cas pour le programme Scorpène® Malaisie (certaines parties avaient été construites sur le chantier espagnol Navantia) ou Brésil (partie avant du Riachuelo réalisée à Cherbourg et transférée sur le chantier brésilien ICN pour être jonctionnée à la partie arrière).  
Par ailleurs, rappelons-nous que la jonction de tronçons de sous-marin est un savoir-faire complexe en lui-même, mais sa mise en œuvre constitue une opération tout à fait élémentaire dans le processus de construction d'un sous-marin. Nous maîtrisons cette expertise via les équipes de Cherbourg qui sont largement aguerries sur ce sujet : preuve en est la construction simultanée de 5 Barracuda en ce moment sur le site de Cherbourg.

Franck Ferrer devant le SNA Perle au moment de son entrée dans la forme Cachin du site de Cherbourg